Bon Iver - "For Emma, Forever Ago"
Miles Davis - "Filles De Kilimanjaro"
Miles Davis - "A Tribute To Jack Johnson"
Toumani Diabate & Ballake Sissoko
Gene Harris & The Three Sounds
Eric Legnini & The Afro Jazz Beat
Black Joe Lewis & The Honeybears
Ibrahim Maalouf - "Diagnostic"
Michel Petrucciani - "Le Film"
Archie Shepp & Jasper Van't Hof
Matthew Shipp & William Parker
Esbjörn Svensson Trio - "Viaticum"
Esbjörn Svensson Trio - "Live in Hambourg"
Jesse Sykes & The Sweet Hereafter
Weather Report - "Weather Report"
Weather Report - "I Sing The Body Electric"
Miles Davis - "Filles De Kilimanjaro"
Eric Bibb - "Deeper In The Well"
Sly & The Family Stone - "There's A Riot Goin' On"
Etoile De Dakar Vol 4 - "Khaley Etoile"
Pete Rock & CL Smooth - "The Main Ingredient"
Ahmad Jamal - "At The Pershing - Not For Me"
John Ellis - "Roots, Branches & Leaves"
Miroslav Vitous - "Magical Shepherd"
Dr John (Malcolm John "Mac" Rebennack, Jr ) est de ces hommes intègres et vrais, totalement impliqué dans la création de ses oeuvres et toujours fidèle à l'imagerie historique et sociale de la musique blues qu'il chante depuis plus de 40 ans.
Originaire de la Nouvelle Orléans, cette ville incontournable qui l'a forgé et préparé à devenir musicien depuis son plus jeune âge (à 12 ans le gamin tapait déjà des boeufs dans des clubs de la région), il n'a depuis jamais cessé de tenter de faire revivre l'esprit singulier et tellement unique de cette ville qui l'a vu naître en 1940 et dans laquelle jouaient alors tous les maitres du genre. C'est donc d'abord comme clandestin que le jeune Malcolm pénètre dans les clubs, fasciné par les stars qui s'y produisent tels que le pianiste Professor Longhair ou Frankie Ford et les Thunderbirds. Il sera très vite accepté et pendra vite part à des sessions d'enregistrements pour de nombreux musiciens locaux ainsi que pour quelques petites maisons de productions. D'abord guitariste, il sera finalement contraint de revenir au piano (son instrument de prédilection) à la suite d'une altercation à l'arme à feu dans laquelle il perd un doigt de la main gauche en tentant de protéger son ami, le claviériste Ronnie Barron, qu'un déséquilibré avait tenté d'assassiner à la sortie d'un motel de Jacksonville. Quelques opérations chirurgicales plus tard (une greffe d'annulaire réussie) il finit par déménager à Los Angeles afin d'y dégoter de nouveaux contrats avant d'adopter, au milieu des années 60, son désormais légendaire surnom de Dr John (repris du nom d'un médecin vaudou de la Louisanne qui exerçait au 19e siècle).
C'est à cette époque qu'il impose son style et son art. Il marque notamment les esprit lors de ses concerts avec un son et une mise en scène très novateurs mêlant la sueur des cérémonies vaudou au folklore du rythm and blues de Louisianne, le tout marqué d'une touche de psychédélisme due, en grande partie, à un grand sens de la composition, mais aussi, disons-le, à des prises de drogues très importantes, ce qui lui aura certainement permis de se révéler au-delà de ses intuitions (un débat à part et largement ouvert mais que je ne saurais expliquer autrement pour définir les capacités de certains à se transcender dans leur art).
"Gumbo", l'album dont il est question aujourd'hui, est le 5e de son oeuvre et a été enregistré en 1972 chez la firme Atco (un sous-label d'Atlantic). L'idée de Dr John est ici de rendre hommage à ce qui l'a construit, autrement dit à l'âme de la Nouvelle Orléans, en reprenant des thèmes bien connus qui étaient joués dans les années 40 et 50. Il puise dans ses souvenirs les thèmes qui l'ont marqué (lui et tant d'autres), et les réadapte 30 ans plus tard à la sauce "Night Tripper" (autre surnom de l'époque). « En 1972, j'ai enregistré Gumbo, un album hommage et également mon interprétation de la musique avec laquelle j'avais grandi à la Nouvelle-Orléans. J'ai essayé d'immiscer dans cet album tous les changements caractéristiques de cette musique, tout en y ajoutant mes propres ingrédients funky au piano ou à la guitare ».
Moins théatraux que ses précédents disques ("Gris Gris" en tête), les 12 titres de "Gumbo" sont surtout
savamment orchestrés et nous plongent dans les nuits chaudes et bouillonnantes des bayous de Louisianne de la plus généreuse des manières. Il est aussi moins propice au mysticisme régional (même
si l'esprit ne l'a jamais vraiment quitté), car il s'agit bien de parvenir à nous faire ressentir l'atmosphère de mardi gras joviale et festive qui y régnait à cette époque. Le pari est bien sur
plus que convaincant et ce disque figure, inutile de vous le dire, parmi les plus réussis de l'artiste.
Maintenant que le décor est planté vous savez à quoi vous attendre, et si vous ne connaissiez pas encore ce personnage
incontournable, alors appréciez donc ces moments de groove "noir" à la voix blanche et dites-vous bien qu'il en existe peu de semblables.
A première vue, Donovan Frankenreiter n'a rien pour plaire (au moins aux hommes). Blond, beau gosse, champion de surf sponsorisé par une grande marque depuis ses 13 ans, et pour couronner le tout, chanteur et guitariste de blues/rock ayant déjà sorti 2 albums et un EP (rien que ça).
En fait, c'est sa femme qui, la première, le pousse à enregistrer ses chansons et à les jouer sur scène. Ca tombe bien, il a déjà un petit répertoire et décide alors de contacter son ami de longue date, le chanteur et réalisateur Jack Johnson (surfeur comme lui), qu'il connait depuis longtemps, et qui va l'aider à réaliser son souhait. Chose faite en 2005, à 33 ans, avec son premier album éponyme dont il accompagne la sortie par
une grande tournée mondiale. Cette tournée s’achèvera à la fin de la même année par un concert dans les mythiques studios d’Abbey Road (là où les Beatles ont enregistré le White Album).
Move By Yourself, l'album que j'ai choisi de vous faire partager, est dans la droite lignée de ce qu'il avait déjà entrepris un an plus tôt. 11 morceaux, plus 3 titres bonus pour un total d'un peu plus de 56 minutes. La sonorité du disque transporte inévitablement l'auditeur sur les plages de sable fin californiennes. Des titres courts sur une base de riff de guitare ou de clavier funky, voire plus soul, et le tour est joué. Le soleil, la plage, tout y est. La voix caractéristique de Donovan distille des balades très propres et sans grandes difficultés, musicalement très facile, comportant peu d'arrangements créatifs si ce ne sont des choses connues, voir attendues. Pourtant, malgré ce manque de singularité flagrante, je ne parviens pas à trouver de réels défauts à ce disque (peut-être certaines gammes ou certains accords que l'on retrouvent un peu trop souvent). Sans doute est-ce dû à la morosité et à la froideur environnantes des grandes villes, ou peut être à mon côté fleur bleue, mais le fait est que ses morceaux, en les écoutant avec parcimonie et de manière espacée (pour eviter un gavage tout de même possible), peuvent être de vrais antidépresseurs, comme ce "That's Too Bad" que je vous laisse en écoute.
Pour faire simple, une fois laissés de côté les clichés stéréotypés du genre (le surfeur blondinet qui se met à la chanson), et après avoir considéré l'exercice, non pas comme une tentative tendant à révolutionner la musique, actuelle mais simplement comme un délire de hippie branché, touche-à-tout, plutôt talentueux, et qui se fait plaisir en profitant au maximum de ce que la vie lui offre, on se laisse très facilement emporté par ce flot marin et ensoleillé. Pour tout cela, pour cette simplicité loyale et ce côté "sans prétention" de celui qui ne cherche pas à se faire passer pour ce qu'il n'est pas, je pense que ce disque vaut le coup et qu'il tiendra sur la longueur (en tous cas pour moi qui l'ai depuis 3 ans, et je l'écoute toujours avec beaucoup de plaisir).